dépêche, télégraphe, abdication © Archives départementales du Bas-Rhin.

Le 24 février 1848, à la surprise générale, le pouvoir monarchique s’effondre comme un château de cartes …

C’est l’interdiction de la tenue d’un banquet venant clore une campagne en faveur de l’élargissement du droit de vote qui met le feu aux poudres. Le 22 février 1848, des premières échauffourées sont signalées Place de la Concorde à Paris...

Le lendemain, la garde nationale rejoint la foule et demande la démission du président du Conseil François Guizot. Comprenant que la situation exige un geste d’apaisement, Louis-Philippe accepte la démission de Guizot et demande au comte Molé de constituer un ministère, nomination accueillie très favorablement par la foule parisienne. Un accrochage devant le ministère des Affaires étrangères (Maurice Agulhon défend la thèse de l’accident) provoque la mort d’une centaine de personnes, dont les cadavres sont transportés dans les quartiers ouvriers. La rupture se concrétise avec l’édification des premières barricades.

À la surprise générale, le pouvoir monarchique s’effondre comme un château de cartes. Le 24 février, Louis-Philippe annonce son abdication en faveur de son petit-fils, le comte de Paris, âgé de neuf ans. La régence est alors confiée à la duchesse d’Orléans, qui se rend à la Chambre des députés. Au moment où un député orléaniste présente la régente et le comte de Paris, la foule envahit la Chambre, obligeant la duchesse à s’enfuir. La famille royale s’exile alors à Londres. Au soir de cette journée, la Monarchie de Juillet est morte et la République, proclamée à l’Hôtel de Ville par un gouvernement provisoire hétéroclite (Lamartine, Crémieux, Ledru-Rollin). Ce gouvernement provisoire fait connaître, le 26 février, son souhait de voir la France devenir une République mais suite à une ratification par le peuple[1].

Les événements parisiens ont un retentissement en province, mais il est nécessaire de tenir compte des délais nécessaires aux informations pour circuler. Le préfet du Bas-Rhin dispose d’un atout, le télégraphe optique, mais toutes ses décisions sont prises avec un décalage de 24 heures. Les documents de la sous-série 3 M (Police générale et administrative) présentés ci-dessous illustrent parfaitement les différentes étapes de la circulation de l'information depuis la capitale : de la dépêche télégraphique en passant par le brouillon pour l'impression et la publication de l'affiche.

Le 25 février, le préfet fait publier une adresse à l’attention des habitants du département. Il annonce l’abdication de Louis-Philippe et la régence de la duchesse d’Orléans au nom du roi Louis-Philippe II. La nomination du général Lamoricière comme commandant général de la garde nationale de Paris est présentée comme un gage de calme et de conciliation. Dans son adresse, le préfet donne les informations les plus récentes en provenance de Paris (reçues la veille par télégraphe) et précise qu’il les livre en l’état, de la façon la plus neutre possible. Il demande le plus grand calme, imposé à l’Alsace par « le voisinage de l’étranger »[2]. Le préfet prend soin de faire afficher les deux dépêches télégraphiques reçues la veille à la suite de sa proclamation. 

Chaque dépêche indique notamment la date et l’heure d’envoi ainsi que celles de la réception, ce qui permet de connaître à quel moment, à quelle heure, l’information en provenance de Paris est connue par l’autorité préfectorale.

Vincent CUVILLIERS


[1] Le principe du suffrage universel est proclamé le 25 février 1848 par un décret du gouvernement provisoire.

[2] Proclamation du préfet, 25 février 1848.

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  • Brouillon de la proclamation faite par le préfet du Bas-Rhin le 25 février 1848, ADBR 3 M 70 - © Archives départementales du Bas-Rhin
  • Brouillon de la proclamation faite par le préfet du Bas-Rhin le 25 février 1848, ADBR 3 M 70 - © Archives départementales du Bas-Rhin.
  • Dépêche télégraphique du ministre de l’intérieur aux préfets, 24 février 1848, ADBR 3 M 70. - © Archives départementales du Bas-Rhin
  • Proclamation du préfet du Bas-Rhin le 25 février 1848, ADBR 3 M 70 - © Archives départementales du Bas-Rhin